Selon une légende du sud de la France, Gaston Fébus, comte de Foix, aurait blessé un sanglier à la chasse au 14e siècle. L'animal blessé s'est échappé. Des mois plus tard, sa carcasse fut retrouvée dans l'eau de source chaude et salée de la ville de Salies-de-Béarn. Ceux qui l'ont trouvée ont été stupéfaits de constater que sa viande était préservée et encore comestible. Cette découverte des qualités de conservation de la viande de porc salée a donné naissance à une industrie de production de jambon qui n'a cessé de prospérer depuis lors. Cette légende imagée et teintée de royauté pourrait également être apocryphe : des siècles plus tôt, les Gaulois avaient envoyé du jambon de cette région à l'empereur de Rome. Quoi qu'il en soit, l'importance historique de ce produit est incontestable. En 1660, lorsque le roi Louis XIV épouse Marie-Thérèse d'Espagne dans la ville de Saint-Jean-de-Luz, le jambon de Bayonne figure au menu de la célébration. Voyons de plus près la réglementation de ce jambon de Bayonne.
Le Jambon de Bayonne : un mariage de tradition et de ressources locales !
La filière du jambon de Bayonne d'aujourd'hui allie tradition et ressources locales. Le jambon est produit selon une réglementation basée sur des pratiques anciennes, et est encore conservé exclusivement avec du "sel de montagne" interne provenant du pied des sommets pyrénéens. Le jambon de Bayonne ainsi obtenu, vieilli de neuf à douze mois, est réputé pour son goût et sa qualité. L'origine et les propriétés de ce sel interne sont intrigantes. Ce "sel de montagne" du sud-ouest de la France est récolté depuis l'âge de bronze.
Aujourd'hui, à 45 kilomètres à l'est et à l'intérieur des terres de l'océan Atlantique, un puits de 200 mètres de profondeur nommé Reine Jeanne d'Oraas produit une eau chaude dix fois plus salée que l'eau de mer. En effet, elle a été en contact avec des couches de sel déposées il y a des millions d'années lorsque ce terrain vallonné était recouvert par les mers. Cette eau est riche de 26 oligo-éléments, dont le magnésium, le zinc, le strontium, le lithium, le sélénium, le nickel et le cobalt. En outre, ce minéral possède des propriétés hydroscopiques uniques qui permettent au sel de mieux pénétrer dans la viande. Pour en savoir plus sur le processus de fabrication du jambon de Bayonne, suivez ce lien
Le jambon de Bayonne : conservé avec un sel spécial !
Cette eau est transportée du puits d'Oraas sur huit kilomètres par canalisation jusqu'à la société de gestion des salines de Salies-de-Béarn. Ici, des montagnes de sel sont empilées pendant des mois dans un entrepôt afin de réduire le taux d'humidité de 5 % à 3 %. Comme les quatre cinquièmes de ce sel sont utilisés pour l'affinage du jambon local et que le jambon de Bayonne ne peut être conservé qu'avec ce sel, il n'est pas étonnant que le consortium du jambon ait racheté toute cette production de sel.
À une température inférieure à l'ébullition, l'eau salée s'écoule d'un pipeline vers d'énormes réservoirs en forme de bassin. La plupart du gros sel coule au fond et est finalement utilisé pour traiter le jambon. Il est à la fois pur et très blanc. Une fraction du sel, cependant, flotte à la surface de l'eau. Elle est écumée par des personnes munies de filets, comme les écumeurs de piscine utilisés pour attraper les feuilles. Appelé Fleur de Sel, ce sel est apprécié des chefs gastronomiques pour ses propriétés de légèreté, de goût, de croquant et pour le fait qu'il conserve sa saveur après cuisson.
Le Jambon de Bayonne : produit avec du porc issu d'une exploitation familiale !
Outre les influences gustatives de ce sel intérieur, la qualité du jambon de Bayonne est liée aux contraintes traditionnelles dans lesquelles il est produit. La plupart des porcs qui produisent le jambon de Bayonne sont élevés dans des centaines d'exploitations familiales relativement petites, d'une superficie moyenne d'environ 40 hectares chacune. De nombreux agriculteurs cultivent également du maïs et du soja pour nourrir leur bétail. Si l'on peut élever des porcs dans 22 départements administratifs et géographiques de trois régions historiques du sud-ouest de la France (Aquitaine, Midi-Pyrénées et Poitou-Charentes), leur viande ne peut être salée et vieillie qu'au sud de l'Adour. En effet, ce "bassin de l'Adour" était historiquement assez frais pour permettre la production de viande stérile. Le climat qui en résulte est optimal pour la production de jambon.
Le jambon de Bayonne : vieilli dans les montagnes !
L'élevage des bovins selon les normes strictes de l'Union européenne permet au jambon de Bayonne d'être certifié IGP (Indication Géographique Protégée). Cette appellation est analogue à l'AOC du gouvernement français pour les vins : elle indique que le produit a été préparé, testé et accrédité selon des normes de qualité et d'origine. Les contrôles de qualité sont constants et légion et proviennent des agriculteurs eux-mêmes, des membres du consortium ainsi que d'organismes indépendants. Historiquement, sans réfrigérateur, le jambon était traditionnellement vieilli dans les montagnes où il reste plus frais. Au Moyen Âge, le porc était salé en novembre, décembre et janvier pour stabiliser la viande, puis placé dans des granges au printemps où il était séché du vent.